Pourquoi les pratiques rituelles ?

LES PRATIQUES RITUELLES

Les pratiques rituelles ont été pour moi une voie de passage privilégiée pour adresser une faim brulante qui me tenaillait les entrailles ; une faim de l’âme, de l’essentiel, du sacré!

Dans cette quête, l’axe du rituel  m’a servi de phare dans le noir.  Il a constitué un monde en soi, à l’intérieur duquel je pouvais apprendre à vivre et à créer la vie reliée que j’appelais de tous mes vœux.

Comme le propose Jeffrey (2018), j’ai ainsi pu découvrir dans l’expérience que le rituel pousse le sujet à l’éveil, c’est-à-dire à s’approprier toujours davantage à la fois l’intimité́ de son être et la culture qui est son lieu propre d’édification. Dans la même perspective, et à la suite de Hillman (1999) Somé (2005) envisage les pratiques rituelles comme des espaces temps de guérison qui permettent d’établir un rapport privilégié avec la nature et « l’invisible ». Selon cet auteur : « On ne peut guérir la psychè́ individuelle qu’en examinant ses rapports avec le monde visible, soit la nature et la communauté́ ainsi qu’avec les forces invisibles que constituent les ancêtres et les alliés du monde de l’esprit […]. C’est dans le rituel que la nature, la communauté́ et le monde de l’esprit se rassemblent pour soutenir l’édification intérieure de notre identité́ véritable (p. 27). »

Mais qu’est-ce qu’un rituel ?

Malidoma Somé (1999) nomme avec justesse que le rituel est une activité communautaire et un acte de création pure capable de générer une énergie particulière pouvant englober les individus, favorisant l’expansion de leur conscience et l’enclenchement de la transformation nécessaire à leur guérison. Ces actes profonds et symboliques permettent aux individus et aux collectivités de donner du sens aux multiples passages que comporte l’existence.

Pascale Lardellier (2018) nomme avec justesse que « Le rite instaure une relation implicite et puissante à une autre dimension, à une autre temporalité́. Il met de la transcendance, de la mémoire et de l’histoire sur des choses qui sans lui seraient strictement factuelles. N’oublions pas la définition canonique de Mauss : « le rite administre le rapport des hommes au sacré ».

Toute notre vie, de façon plus ou moins consciente, nous sommes traversés par de grandes questions existentielles : Qui suis-je ? Ou suis-je ? D’où je viens ? Où vais-je ? Qu’est-ce que je suis venu faire ici ? Le rituel est un outil puissant qui permet d’adresser ces grandes questions inhérentes à la nature humaine tout en redonnant du sens aux nombreux passages qui traversent nos existences.

 

Pourquoi est-ce important de ritualiser ? Quel est l’impact du manque de rituel dans notre culture ?

Somé (2005) explique que le rituel facilite non seulement la guérison, mais permet aussi de recouvrer la mémoire profonde et de réaffirmer le but de notre vie. Il explique que pour Les Dagaras- ethnie du Burkina Faso – chacun nait avec un but bien précis dans la vie qu’il est nécessaire de connaitre pour s’assurer de mener une existence harmonieusement intégrée : « Les gens qui ne savent rien du motif pour lequel ils se trouvent sur cette terre sont comme des navires à la dérive sur une mer hostile. Le rituel permet de prendre contact avec notre vocation et de rétablir la connexion entre ses profondeurs et tous les êtres vivants, permettant ainsi de redécouvrir sa place dans le monde naturel qui est la véritable demeure de tous les êtres qui vivent sur terre. »

Pascale Lardelier (2018) abonde dans le même sens : « le rite instaure un rapport vertical, appelle à la transcendance ; il est ce sens résistance à l’aplatissement marchand du monde, tout en produisant de la mémoire longue, contre l’amnésie du flot quotidien. Notre époque, parfois oublieuse de cette dimension, feint de négliger le rite, mais revient à lui souvent, comme la vague revient à la plage, quand l’appétence symbolique resurgit. »

À suivre 😉

Catherine Dajczman

 

Bibliographie 

Denis Jeffrey et Martine Roberge( dir.), Rites et ritualisation, PUL, 2018 ( les presses de l’université Laval)

Denis Jeffrey et Martine Roberge (dir,), Rites et identités,PUL,2018

Hillman, J., & Arman, B.[DB1] (1999). Le code caché de votre destin: prendre en main son existence en élevant sa conscience de soi. R. Laffont.

Lardellier, P. (2018). Le rite, entre résilience et résistance. Relations, (799), 17–18.

Patrice Somé, Malidoma, Sagesse Africaine, Ariane Editions, 2005